Note Smolny :
Attention, entreprise éditoriale exceptionnelle, qui nous restitue avec un soin remarquable la thèse et la bibliographie inédite de Jacques Grandjonc sur l’apparition et le sens politique donné aux mots communisme / communiste et termes associés dans les trois principales langues d’échanges en Europe à l’époque (allemand, anglais, français). L’étendue des événements convoqués, des sources sollicitées et des pièces ici restituées font de cet ouvrage une porte ouverte sur d’innombrables explorations historiques et littéraires, réflexions politiques toujours stimulantes, comparaisons critiques, etc.
Il est également possible de lire l’introduction de l’ouvrage dans la rubrique « collection de textes ».
E.S.
Présentation de l’éditeur :
« Faire l’histoire d’un mot, ce n’est jamais perdre sa peine. »
Jacques Grandjonc a suivi à la lettre cette proposition de Lucien Febvre.
Communisme / Kommunismus / Communism est la première et unique analyse historique et philologique qui vise à saisir l’émergence en Europe de la question sociale et de son champ lexical. Il étudie l’origine et le développement des termes « communiste », « communisme » et d’un certain nombre d’autres apparentés, tels « coopération », « socialisme », « mutualisme »... nés, entre 1785 et 1842, au sein de groupes parfois infimes mais décidés à transformer la société et résolument hostiles à l’individualisme et à la propriété privée.
De Restif de La Bretonne aux premiers écrits de Marx et d’Engels en passant par Babeuf, Maréchal, Riedel, Buonarroti, Owen, Leroux, Cabet, Considerant, Weitling, Dezamy, Lebon, etc., Jacques Grandjonc suit — textes à l’appui, pour la plupart inédits — la germination d’un vocabulaire communautaire, révolutionnaire et international qui sera au cœur de l’histoire du XIXe, du XXe et du XXIe siècle.
L’auteur :
Professeur de civilisation allemande à l’Université de Lyon puis à celle d’Aix-Marseille, Jacques Grandjonc (1933-2000) explora en archiviste, historien, démographe et philologue l’émigration allemande au XIXe siècle. Il présenta dans le Dictionnaire de Maitron et, surtout, dans Marx et les communistes allemands à Paris la vie de ces proscrits qui, entre la Ruhr, Bruxelles, Paris et Londres, mangèrent le « pain amer de l’exil ». Il dirigea également des travaux sur l’internement d’Allemands et d’Autrichiens avant et pendant la Seconde Guerre mondiale (Zone d’ombres, 1933-1944). Au début des années 1990, il fut, avec l’aide de l’Institut d’histoire sociale d’Amsterdam et de la Maison Karl-Marx de Trèves, le principal artisan de la reprise, sous de nouveaux critères — non politiques —, de l’édition des œuvres complètes de Marx et d’Engels (MEGA).
Table des matières
Note de l’éditeur (2013)
Avant-propos de l’auteur
Abréviations
Introduction
1. Historique
I. Des communautés et des coutumes rurales archaïques à l’utopie communautaire de la fin du XVIIIe siècle
II. De l’utopie communautaire à la révolution sans-culotte
III. Cheminements souterrains, résurgences et sources nouvelles
IV. Les mouvements républicain et socialiste des années trente
V. Amorces internationales, 1832-1839
VI. Communisme : extension internationale et diversification, 1840-1842
VII. L’amorce des grands débats du socialisme et du communisme
Conclusion toute provisoire
Principales organisations démocratiques et ouvrières, nationales et internationales, 1821-1847
2. Pièces Justificatives
1. L’usage archaïque, rural et juridique de « communiste »
depuis 1706
2. Auteur communiste, 1785
3. Loi du maximum, Communauté, Egalité parfaite, novembre 1793
4. Revoluzion, Sansculottismus und Kommunismus, 1794
5. Conspiration pour l’Égalité, dite de Babeuf, an IV (1795-1796)
6. Nous-seuls Patriotes-Républiquains-Communistes, 1797
7. Toutes les Religions sont inutiles au bonheur de l’Home, 1797
8. Le Communisme, qui serait le meilleur des Gouvernemens, 1797
9. Histoire du parti démocratique en l’an IV
10. Les saint-simoniens et la question sociale, 1828-1832
11. Deux « Aphorismes » de Napoléon Lebon, 1834
12. La société se divise en deux grandes catégories, avril 1835
13. Une secte de Communistes ou radicaux, 1835
14. Communiste et communautaire, automne 1839
15. Babouvisme et parti démocratique, novembre 1839
16. Citoyen, Frère, Démocrate, Républicain, ou Communiste, janvier 1840
17.La situation de la classe ouvrière britannique, février-mars 1840
18. Premier banquet communiste, 1er juillet 1840
19. Suite au banquet de Belleville
20. Communisme, juillet 1840
21. French Communists, Communism, juin-août 1840
22. Transformer le Communisme en Babouvisme, août 1840
23. Le communisme actuel, 13 août 1840
24. Un prolétaire qui parle comme il peut, 20 août 1840
25. Comment je suis Communiste, 7 novembre 1840
26. Le Matérialisme doit être proclamé, 20 juillet 1841
27. La question du mariage et de la famille, septembre 1841
28. Communisme / Cornmunionisme, septembre 1841
29. Kommunion, Kommunisten und Kommunismus, Weitling contre Niederer, novembre-décembre 1841
30. L’« Allgemeine Zeitung » contre le tailleur Weitling, novembre-décembre 1841
31. Der Communismus, eine Spraehe, die jedes Volk versteht, 11 décembre 1841
32. L ’ « Allgemeine Zeitung » contre le communisme français novembre 1841 - janvier 1842
33. Le communisme en France vu d’Allemagne, janvier-octobre 1842
Bibliographie des ouvrages et sources utilisés
Avertissement de l’éditeur :
Cet ouvrage a paru en 1989 à Trêves, à la Karl-Marx-Haus (Schriften aus dem Karl-Marx-Haus Nr. 39/1-2) ; il reprenait, en deux volumes, la modifiant quelque peu, une thèse de doctorat soutenue à Metz en 1979. Un troisième volume — resté inédit — était annoncé. Il devait comporter lexique, index thématique et bibliographie (voir ci-dessous p. 27). Les recherches effectuées par Mme Monique Grandjonc — que nous remercions vivement pour l’autorisation qu’elle nous a accordée de publier l’œuvre de son époux — et par M. Louis Grandjonc, son fils, ont permis de retrouver la bibliographie, datée d’octobre 1998, que nous reproduisons telle que Jacques Grandjonc l’a laissée. Malheureusement, lexique et index sont restés introuvables.
Avant-propos
La langue est le ciment des actes ; non seulement elle les rend explicites, mais elle en conserve l’empreinte... Le contenu des faits culturels et le contenu de la langue ressortissent à des domaines d’exploitation scientifique différents, mais comme les deux faces d’un même objet ; il est impossible de pénétrer l’une sans aboutir à l’autre.André Leroi-Gourhan.
Cette étude sur les origines du vocabulaire communautaire, révolutionnaire et international n’est, malgré un aspect lexicographique indéniable, ni une nouvelle « Encyclopédie socialiste » ni un autre « Dictionnaire du marxisme ». Il s’agit d’un essai qui vise à saisir l’émergence d’un champ du vocabulaire social en même temps qu’est retracée ou mise au jour l’action d’individus ou de groupes, parfois infimes mais décidés à transformer la société et résolument hostiles à certaines formes d’individualisme et de propriété privée. À la fois une réponse — différée — à la question maintes fois posée de la première date d’emploi de « communiste/communisme » et une réponse — préalable — à la question de la transformation des mentalités sociales en Europe occidentale en cours d’industrialisation dans la première moitié du XIXe siècle ; question qui s’est imposée au cours d’une série de recherches, entreprises de façon isolée d’abord, puis en collaboration, sur la naissance concomitante du mouvement ouvrier allemand (hors les frontières de l’Allemagne) et de l’internationalisme dès avant 1848, ainsi que sur la genèse du marxisme en exil. Un essai qui ressortit autant et plus à l’histoire qu’à la lexicographie, l’une et l’autre traitées sur la longue durée et décloisonnées des frontières nationales, avec le souci constant de fournir au lecteur dans leur contexte les documents originaux rassemblés. Un essai historique et critique qui a également l’ambition de fournir à ceux que l’enjeu des discussions actuelles sur l’avenir du socialisme ne laisse pas indifférents un outil d’appréhension intellectuelle des débats du socialisme dans ses origines.
Les deux premiers volumes de ce travail ont été présentés à Metz en octobre 1979 comme thèse d’État ; leur parution, dix ans plus tard, m’a permis de corriger erreurs ou approximations de la version initiale et de la compléter du résultat des lectures intervenues depuis.
Étude sur les hommes et la terminologie de la communauté, ce livre est aussi en quelque sorte le résultat d’un travail communautaire, et je tiens à remercier ici celles et ceux qui ont participé d’une façon ou d’une autre à son élaboration, en premier lieu Monique et Bert, dont les lectures ont orienté de façon décisive la recherche ; à Aix-en-Provence, Mme Sauze, Georges Dumarchez, Jean Vivian ; à Amsterdam, Tristan Haan, Maria Hunink, Götz Langkau, Jürgen Rojahn ; à Berlin, Joachim Höppner et Waltraud Seidel-Höppner ; à Cologne, Alfred Kôrner ; à Cracovie, Marian Plezi ; à Genève, Bert Andréas, malheureusement disparu entre-temps, et Jacques Frey-mond ; Günther Mühlpfordt à Halle ; Klaus Bochmann et Johannes Thiele à Leipzig ; Dorothea Kuhn à Marbach a. N. ; Th. Payr et Hans-Joachim Ruckhäberle à Munich ; à Paris, Françoise Dumas et Édith Lançon, Angelika Hechenblaickner, Françoise Lagier, Sophie Lutz et Ginette Vargin-Orru ; Léon Centner, Jacques Droz, Michel Espagne, Pierre Grappin, Guy Putfin, Mondher Sfar, Michael Werner ; à Tel-Aviv, Walter Grab ; Jean-Pierre Lassalle à Toulouse ; à Trèves, Wolfgang Schieder ; à Washington, James Billington.
Une mention particulière revient enfin à la Karl-Marx-Haus à Trèves, dont j’ai largement mis les collaborateurs à contribution, entre autres Karl-Ludwig König et Karl Salm à la bibliothèque, Marion Barzen, Margret Dietzen, Helmut Elsner, Silvia Götzen, Heribert Lambert et Elisabeth Neu ; sans oublier le directeur, Hans Pelger, qui d’emblée s’est proposé à publier le résultat de cette recherche, dans la meilleure tradition internationaliste de 1840.
Aix-en-Provence, janvier 1977.
Trèves, septembre 1989.
Éditions des Malassis, parution le 07/03/2013
ISBN : 978-2-84990-238-7
656 pages / 16 x 24,5 cm / 32 euros